Le podcast, outil de thérapie ?



Si vous cherchez la définition de neurosapiens dans le dictionnaire, vous ne la trouverez pas. Car c’est un nom inventé par Anaïs Roux pour son podcast. Un podcast qui n’est pas axé sur la psychologie mais sur les neurosciences. Elle travaille alors dans une entreprise de neurotechnologies et passe beaucoup de temps dans son entourage à expliquer comment fonctionne le cerveau. Le podcast se présente comme étant le média le plus accessible pour vulgariser un message pas toujours clair et très mal expliqué – voire dommageable pour le grand public – sur les grands médias.

Alors que son podcast était un hobby, Anaïs Roux décide de quitter son travail en 2021 pour se lancer à temps plein tête baissée dans son podcast. Mais en 2023, elle revient sur sa décision et reprend son travail de psychologue à mi-temps. “Ma motivation principale, c’était en effet de retrouver un travail qui me reconnecte à mes racines de psychologue, donc d’avoir cet impact en fait individuel, de suivi…”, justifie Anaïs. Gagner sa vie avec un podcast est très compliqué. Et cela, bien qu’elle ait eu la chance d’avoir signé avec un label (LACMÉ Production, ndlr) qui fait tout un travail de développement, de commercialisation et qui signe des sponsors. “Les revenus restent instables. Je pense que c’est important à savoir quand on veut se lancer dans le podcast. Avoir repris un mi-temps en entreprise permet de m’apaiser l’esprit financièrement et de retrouver 100% de ma motivation dans la pratique du podcast.”

Une manière de parler de son métier

Les psychologues n’ont pas été formés dans leur pratique à s’exprimer sur leur travail, à s’exprimer sur ce qu’ils font tout court. “Je trouve que le podcast, c’est vraiment une super plateforme qui est accessible à tout le monde et qui nous permet de partager notre pratique, de partager des connaissances qu’on a, au plus grand nombre. J’ai conscience que d’aller voir un thérapeute, aller voir un psy, c’est une démarche qui coûte cher, qui peut être compliquée. Et je trouve que le podcast nous permet d’apporter un soutien qui est une première étape thérapeutique pour ceux qui n’ont pas les moyens mais qui veulent un peu s’outiller au quotidien”, avoue Anaïs.

Comment faire pour se motiver face à la charge mentale ? Comment faire pour mieux dormir ? Pour se concentrer, pour mieux manger, pour ne pas procrastiner. Tels sont les sujets que l’on peut apprendre en thérapie et qui, grâce au podcast d’Anaïs, sont un peu distillés au travers des épisodes. Même si nous sommes loin de pouvoir imaginer qu’un épisode puisse se substituer à une séance thérapeutique – car il est scientifiquement prouvé que c’est le lien entre le psychologue et le patient qui fait preuve et qui fonctionne –, Anaïs voit le podcast comme un outil de médiation. “Je vois plus le podcast comme un support qu’on peut avoir entre différentes séances, ou un support qui nous permet aussi d’apprendre certains outils qu’on peut utiliser entre deux séances. Mais pourquoi pas ? Les thérapies en visio étaient complètement inimaginables il y a cinq ans. Donc, peut-être que dans dix ans, on arrivera à trouver une façon de faire pour que ce soit une sorte de thérapie accessible”, soumet Anaïs.

Le podcast pour tous

Le podcast a aussi apporté énormément à Anaïs dans sa pratique de tous les jours. Car pour pouvoir passer un message accessible à tous, il faut bien choisir ses mots et utiliser des métaphores qu’elle utilisait moins auparavant. Mais se lancer dans l’aventure au début n’a pas été de tout repos. Accompagnée par d’autres podcasteurs et plus particulièrement Yoko Trigalot qui lui a gentiment donné des conseils qu’elle chérissait, elle a débuté en enregistrant ses premiers épisodes avec ses écouteurs sous la couette. Elle écoutait les “stars” du podcast parler de l’équipement à plus de 500 euros qu’ils utilisaient et qu’il fallait investir dans telle ou telle appli. “Moi, je culpabilisais beaucoup parce que j’ai acheté un micro qui m’a coûté 60 euros, j’avais un abonnement Canva qui me coûtait 0 euro et je faisais vraiment avec les moyens du bord et je culpabilisais énormément puisque je me disais « Ben, je fais un truc un peu nul », alors qu’au final, le podcast pour moi, c’est ça. La richesse du podcast, c’est que tout le monde peut le faire, même avec un budget à 0 euro”, affirme Anaïs.

Désormais accompagnée

Anaïs ne prenant aucun plaisir à faire la commerciale pour son podcast, elle est depuis plus d’un an sous l’aile de LACMÉ Production. Cela permet à Anaïs de se concentrer sur l’essentiel. De ne plus être le couteau suisse de son podcast et d’éviter le côté chronophage d’avoir à tout faire : “Ça me soulage beaucoup parce que du coup, tout ce que je fais, c’est tout ce que j’aime. Donc, mes journées que je consacrais à Neurosapiens sont redevenues du pur plaisir intégral. De vraiment me concentrer sur la création des épisodes, la recherche des études neuroscientifiques, la vulgarisation. Je reviens vraiment à mon cœur de métier en fait.”

Un PDF et un livre

Anaïs a aussi mis à disposition sur son site Web – moyennant 45 € – un cahier en 22 étapes et 23 fiches pratiques. L’objectif n’est pas d’en faire un business comme beaucoup d’autres podcasteurs qui ont un peu d’expérience, car elle n’accompagne pas les personnes qui veulent se lancer. Ces fiches ont été imaginées seulement pour éviter d’avoir à répéter les mêmes choses à celles et ceux qui lui demandaient régulièrement comment se lancer dans le podcast. Au-delà de ce PDF, Anaïs a eu la chance de publier un livre. Après un projet avorté en 2021, une autre maison d’édition lui propose d’adapter son podcast en livre en 2022 pour une sortie en janvier 2023. “Une grosse partie des chapitres sont des épisodes de podcast retranscrits, remis au goût du jour parce que les recherches scientifiques en un an et demi, il y en a eu plein d’autres. Et un truc qui me frustre parfois dans le podcast, c’est que c’était difficile d’expliquer certaines zones du fonctionnement du cerveau par la voix, sans avoir un support visuel. Et du coup, là, j’ai travaillé avec Lucie Albrecht, qui a illustré des concepts, des théories. Elle a fait toute une bande dessinée en introduction pour expliquer comment le cerveau a évolué au fil des millénaires. Ça a vraiment permis une approche très complémentaire.”

La rigueur scientifique

Anaïs réalise un travail qui représente entre 10 et 40 heures de recherches pour chaque épisode de son podcast selon le sujet. Ses épisodes sont tous scriptés et pas de place pour l’improvisation. “Je scripte parce que j’ai besoin de garder une rigueur scientifique. Et si je pars trop en spontanéité ou en improvisation, la phrase qui fait trop de raccourcis est vite arrivée. J’ai un peu le syndrome de la bonne élève où j’ai besoin que tout ce que je produis soit absolument impeccable”, analyse Anaïs qui conseille également de prendre une pause importante entre deux saisons : “Je fais des pauses de deux mois environ parce que j’ai besoin de m’arrêter. Sinon, je bosse non-stop et je ne respire pas. Je n’ai pas le temps de prendre du recul, de regarder ce que j’ai fait, d’apprendre de mes erreurs, de voir ce que je veux améliorer.”

Si c’était à refaire ?

Si Anaïs avait à changer quelque chose dans son podcast, ce serait principalement le lancement de son premier épisode. Lancé il y a plus de deux ans, son compte Instagram dépasse les 24 000 abonnés, mais elle sait que certains podcasts arrivent à ce nombre en quelques mois car ils maîtrisent mieux les réseaux sociaux qu’elle. “Mes mathématiques sont un peu bancales, mais l’idée est qu’on ne peut pas dissocier une stratégie de podcast à une stratégie de réseaux sociaux. Et moi, je l’ai fait pendant très longtemps et je le fais encore. Et je pense que c’est la principale erreur qu’il faut que je modifie dans pas très longtemps parce que sinon il y a un peu de frustration”, conclut Anaïs.

Fondateur chez EDITIONS HF
Je suis Philippe Chapot, le fondateur de Podcast Magazine, Le POD, La Lettre Pro de la Radio, le Paris Radio Show et je suis en veille permanente dans les secteurs de la radio, de l'audio digital et du Podcast.
CHAPOT PHILIPPE

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À propos de l'auteur /

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