Le DINARD PODCAST FESTIVAL nous dévoile le portrait d’un invité ou un participant, acteur.ice du podcast créatif. Aujourd’hui, Blandine Masson.
QUE DURAS VOGUE SUR L’ONDE DE ST ENOGAT…
Réalisatrice radio, formée au contact d’Alain Trutat, héritière de la tradition française de la fiction sonore, Blandine Masson dirige le programme des fictions de France Culture depuis une quinzaine d’années. De la radiophonie jusqu’aux podcasts natifs, son expérience couvre un large spectre esthétique. Au printemps dernier, elle a publié Mettre en ondes, la fiction radiophonique, chez Actes-Sud – la transmission s’y révèle fondamentale. C’est grâce à son soutien que France Culture s’associe à la naissance du festival de Dinard à travers un hommage à Marguerite Duras,disparue il y a 25 ans. Un épisode de L’Amant, lu à l’oreille de chacune et chacun par Ludmila Mikael, réalisé par Cédric Aussir, est diffusé chaque nuit sur la plage de St Enogat.
Pourquoi est-ce important de publier un tel ouvrage aujourd’hui ? A quel lecteur vous adressez-vous et quelle.s conséquence.s voudriez-vous, idéalement, que cela implique ?
Ce livre est le fruit d’une nécessité personnelle –la mienne– et d’une commande, celle de mon éditrice Claire David (Actes Sud Papiers). Au fil du temps et malgré les développements de la fiction, je m’étonnais que le métier de réalisateur de fictions soit toujours aussi méconnu, et parfois même encore inconnu. Pourtant les projets confiés aux réalisateurs sont de plus en plus complexes et ambitieux. Il y a une très forte tradition de l’auteur à radio France, ce qui est très bien mais qui masque l’apport réel du réalisateur. C’est un métier qui pourrait se rapprocher de celui de Chef d’orchestre et qui est en tout cas clairement l’équivalent du metteur en scène de théâtre ou du réalisateur de cinéma. Avec ce livre, j’ai voulu dans un premier temps réhabiliter ce métier, le faire connaître, susciter du désir pour lui. Dans un second temps, j’ai senti la nécessité de le réinscrire dans son histoire, celle de l’alliance complexe du théâtre et de la radio. Les premiers destinataires de ce livre sont les réalisateurs et réalisatrices et tous ceux qui contribuent à l’activité des fictions, quel que soit le métier (comédien, musicien, technicien, conseillères littéraires, administration…) mais aussi les auditeurs, les spectateurs, les amoureux du théâtre, de la radio, du cinéma, de la musique. J’ai voulu réinscrire ce métier dans son histoire et réfléchir à sa place dans le monde artistique. Ce livre est aussi un combat contre l’oubli. Je voulais que les noms de Alain Trutat, Pierre Schaeffer ne nous quittent pas. Le théâtre connaît son histoire (Copeau, Vilar ne sont pas oubliés), le cinéma connaît son histoire, la radio publique, elle, est assez ignorante d’elle même. Je crois que savoir d’où l’on vient donne QUE DURAS VOGUE SUR L’ONDE DE ST ENOGAT… des forces pour l’avenir. Enfin si ce livre peut susciter des vocations, c’est bien.
À l’heure des médias numériques et tandis que toute une jeune génération s’empare des outils numériques et audio, comment intensifier la « transmission », qui est justement au cœur de cet ouvrage? Pourquoi estelle encore si rare et pose-t-elle autant question ?
Je le dis dans le livre, il n’existe aucune école, aucune formation. C’est à la fois heureux et malheureux. Heureux car il n’y a aucun risque de formatage, malheureux parce que cela contribue à la rareté des recrutements. Ce n’est toujours pas naturel d’agréer régulièrement des réalisateurs en France. Si l’on réfléchit à la question de la formation, je ne crois pas qu’elle doive être spécifique. La formation à la réalisation radiophonique devrait s’inscrire dans les parcours des écoles de cinéma ou dans les formations à la mise en scène. Pour réaliser de la fiction, il faut avoir un sens de la direction d’acteurs, de la mise en scène sonore, du texte, de la musique. C’est complexe et c’est large. Dans cet esprit, si je devais ajouter un chapitre à mon livre, ce serait un chapitre sur Giorgio Pressburger, un réalisateur et homme de théâtre italien originaire de la Mittleeuropa. Pressburger était aussi écrivain et il a œuvré comme réalisateur pour la radio, le cinéma, le théâtre. Il ne s’embarrassait d’aucune catégorie, ne s’enfermait pas dans une corporation ou un unique métier.
Auriez-vous une recommandation d’écoute à partager avec les festivaliers en cet été 2021 ?
Le Quatuor d’Alexandre, de L. Durrell réalisé par Christine Bernard-Sugy. Sublime Feuilleton en 20 épisodes de 20 mn chacun. Diffusé tout le mois de juillet à 19h40 .Les 20 épisodes sont disponibles en podcast. Et en août, Sous le volcan, de Malcom Lowry, également réalisé par Christine Bernard-Sugy – 20 épisodes également. Ces deux feuilletons sont des chefs d’œuvres pour moi, de délicatesse, d’inspiration. Réussite d’adaptation, de réalisation, de direction d’acteurs.
Nous diffuserons grâce à vous l’Amant de Duras lu par Ludmila Mikaël. On sait que lecture au micro est un exercice très délicat, comment choisit-on le comédien, la comédienne qui porte un texte ?
C’est le réalisateur qui choisit le comédien ou la comédienne. Et c’est le texte qui l’inspire. Il y a parfois, souvent des évidences qui sont aussi des convictions. Cedric Aussir, le réalisateur, a immédiatement rêvé de confier cette lecture à L. Mikaël. Il faudrait lui demander à lui pourquoi il a entendu cette voix et le rythme associé à cette voix. C’est un processus intérieur très personnel. Je sais que tous deux ont eu un dialogue profond, qu’ils ont avancé ensemble, qu’ils se sont admirablement compris. Par ailleurs, pour lire un texte comme l’Amant et surtout dépasser le stade de la lecture pour entrer dans l’interprétation, il faut beaucoup de technique. Cela ne s’improvise pas la lecture, c’est beaucoup de travail et beaucoup de liberté en même temps. Ludmila Mikaël est un choix parfait de la part de Cédric. C’est un choix juste au sens de la justesse de la musique. Il faut aussi savoir se faire confiance lorsqu’on choisit un acteur, suivre son intuition. Choisir une actrice pour un texte comme l’Amant, c’est un des plus grands risques que l’on puisse prendre à la radio. il ne faut pas avoir peur et il faut assumer ce risque avec celui ou celle que l’on a choisi. C’est exactement ce qu’a fait avec brio Cédric Aussir. Et c’est pourquoi cette lecture est un grande réussite. Quelle magie certainement de l’entendre dans la nuit sur une plage ! Quelle chance ! Propos recuillis par Hélène Courtel le 26 juillet 2021 – Portrait à retrouver
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